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Le hérisson : qui s’y frotte, s’y pique

Posté par Ju le Zébu 18 mai 2018

Mon appartement s’est rempli cet hiver d’accessoires et ustensiles aux adorables imprimés « hérisson ». Un grand merci à Monoprix où je me suis ruinée en rideau de douche, essuie-main et tasses beaucoup trop grandes ! Mais je n’ai pas pu résister. Le hérisson réunit deux éléments clé de la définition de « mignon » : il est petit et rond.

Depuis plusieurs années les animaux ont la cote dans les secteurs de la mode et de l’aménagement d’intérieur. Après les chats, les lapins, et toute une panoplie d’autres animaux de la forêt et de la savane, ce n’est pas étonnant que le hérisson ait aussi sa collection automne/hiver. Le phénomène semble cependant aller bien au-delà du motif textile. Comme le démontre admirablement l’internet, il est maintenant une nouvelle vedette sur youtube notamment. Dernièrement, je voyais apparaître sur mon fil d’actualité Facebook une vidéo dans laquelle trois hérissons coiffés de chapeau de marin faisait une ronde. Hedgehog is the new cute (le hérisson est le nouveau mignon). Cette rigolote farandole m’a cependant mise très mal à l’aise. Un hérisson, comme bien d’autres animaux, n’a rien à faire avec un chapeau sur la tête. Il n’a pas besoin de danser sur une comptine marine. Il n’a rien à faire dans une maison. C’est toute la domesticité animale qu’il faudrait remettre en cause mais cela semble d’autant plus frappant avec des animaux qui vivent encore majoritairement à l’état sauvage.

Maudit, chassé, puis protégé

L’engouement que suscite le hérisson est encore assez récent. En effet, le pauvre animal a longtemps porté la marque du Diable. Il portait malheur et nombreuses étaient ses tares. Présent dans les pâturages, il ferait mourir les vaches. Les villes où l’on en trouve sont maudites (d’après Isaïe dans nos saintes Écritures). Les jardiniers l’ont longtemps détesté et chassé. La population de hérissons avait dramatiquement chuté, menaçant la survie de l’espèce. Depuis la convention de Bern (1979) qui a pour but la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe, le hérisson est protégé. Il est interdit de chasser et tuer les hérissons mais également d’en faire un animal domestique, sous peine d’amende (jusqu’à 9 000 euros) et même emprisonnement (de vous, pas du hérisson).

Quelques informations sur le mode de vie des hérissons d’Europe (Erinaceus europaeus)

Il existe près d’une vingtaine d’espèces de hérisson. Toutes sont caractérisées aujourd’hui comme étant plus primitives que leurs ancêtres (d’il y a quelques milliers d’années) mais elles font preuve d’une très grande adaptation à leur milieu.

L’espèce la plus répandue par chez nous est celle appelée tout simplement « d’Europe ». Son mode de vie se différencie de ses cousins, notamment, par son hibernation annuelle.

Ce drôle d’animal est surtout actif le soir et la nuit (un hérisson qui se balade de jour est probablement malade ou blessé, il faut l’emmener chez un vétérinaire de toute urgence). Environ 21 % de son temps est alors consacré à la chasse (et 75 % au repos!).

Le hérisson est l’un des plus grand insectivore. Il peut faire jusqu’à 32cm de long et pèse entre 450 et 700g. Voilà un sacré prédateur pour les lombrics, les escargots et les scarabées ! Il est très important pour le hérisson de faire des réserves de graisse pour survivre à l’hibernation. En effet, celles-ci lui permettront de se réveiller lorsque les températures remonteront. Le réveil est particulièrement énergivore car il faudra élever la température du corps de l’animal qui sera descendue de 36°C à environ 10°C (voire moins en fonction de la rugosité de l’hiver) mais aussi les battements de son cœur qui seront passés de 190 à 20 par minute !

La recherche de nourriture s’effectue surtout à découvert, d’où l’importance d’avoir une bonne carapace de piquants ! Contrairement aux idées reçues, il s’agit bien de poils plus épais et solide. Lorsqu’il se sent menacé, le hérisson se roule en boule et est alors complètement recouvert de piquants (comme l’explique Jamie dans « C’est pas sorcier », grâce à un muscle autour de son corps , il se referme un peu comme une capuche de sweat-shirt). Il ne connaît pas beaucoup de prédateurs (sauf blaireaux et grandes chouettes) capables de transpercer son armure.

Et hop, en boule ! Il peut rester comme cela pendant plusieurs heures

Beaux jours ou non, le hérisson est un grand solitaire, un brin opportuniste. Il ne vit pas en groupe et hiberne seul dans un nid qu’il se construit sur mesure. Il n’hésite pas non plus à se servir dans les nids des oiseaux ou dans nos poubelles pour compléter son repas.

Dangers et autres joyeusetés contemporaines

Les prédateurs naturels du hérisson sont donc peu nombreux. Les voitures, les tondeuses, les piscines sont source d’accidents mortelles pour lui. Le plus grave reste cependant la destruction de son habitat naturel et donc de ses sources de nourriture. Les pesticides causent eux aussi bon nombre de morts indirectes chez ces petits animaux. Tout de même, n’est-il pas paradoxal que le hérisson, qui se nourrit d’escargots et limaces, meurt du poison que l’on pose sur les laitues pour éviter ces baveuses mangeuses ? Le hérisson est pourtant un élément fort de la biodiversité, car il protège les plantes de trop nombreux insectes qui les dévoreraient trop vite. Il ne tient d’ailleurs pas sa fraîche image d’ami du jardinier pour rien !

Un autre phénomène d’autant plus inquiétant voit le jour : l’élevage (en Amérique du Nord principalement) de hérissons pygmés d’Afrique à « usage domestique ». Adorables avec leurs petites pattes blanches, leurs oreilles rondes et de petite taille, ces hérissons font un tabac sur les réseaux sociaux et font fureur jusqu’en Europe où il est officiellement interdit d’en posséder. Un tel commerce engendre bien sûr quantité de mal-être. L’abandon dans une station de métro londonienne du petit Paddington n’est qu’un des nombreux exemples. Adopter un animal, en particulier un animal généralement sauvage, peut vite devenir ingérable comme en atteste la mode au Japon des ratons laveurs. Ces derniers, abandonnés sur une île par leurs maîtres, ont fini par ravager l’écosystème local dans lequel ils n’étaient initialement pas prévu (et surtout pas en aussi grand nombre).

Je me dis que finalement mes achats compulsifs de tasses et rideau de douche au motif hérisson sont un moindre mal. Je vous conseille si vous voulez un peu plus de hérisson dans votre vie, sans engendrer de souffrance, de (re)lire le conte de madame Piquedru (Mrs Tiggy Winkle, de Beatrix Potter) ou bien de vous tournez vers Jefferson, le dernier roman de Mourlevat dont le héros est un hérisson que ne manque pas de piquant !

Madame Piquedru, la blanchisseuse

Vous ne saviez pas que …

– la parade amoureuse des hérissons est plutôt mouvementée et bruyante. Les deux prétendants sont alors pendant quelques instants complètement vulnérables (et oui, pas possible de se rouler en boule à deux!)

– les petits du hérissons naissent tout rose et sans piquant. Ces derniers n’apparaissent qu’au bout de quelques heures.

– les petits hérissons sont capables de se mettre en boule dès leur 11ème jour.

– le hérisson ne mue pas, il perd ses poils et ses piquants comme nous nos cheveux. La durée de vie d’un piquant est d’environ 18 mois.

-les pattes du hérisson ne sont pas aussi courtes qu’elles ne le paraissent ! Plus de 10cm !

-le hérisson n’aime pas beaucoup l’eau mais il est un très bon nageur (peut-être grâce à ses pattes!)

http://www.animaux-online.com/article,lecture,1037_herissons-domestiques-une-association-tire-la-sonnette-d-rsquo-alarme.html

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