Culture

Voir ou revoir « Dans ses yeux », oscar 2010 du meilleur film étranger

Posté par SandraK 24 novembre 2017

El secreto de sus ojos, 2009, un film de Juan José Campanella

Synopsis officiel : 1974, Buenos Aires. Benjamin Esposito enquête sur le meurtre violent d’une jeune femme.
25 ans plus tard, il décide d’écrire un roman basé sur cette affaire « classée » dont il a été témoin et protagoniste. Ce travail d’écriture le ramène à ce meurtre qui l’obsède depuis tant d’années mais également à l’amour qu’il portait alors à sa collègue de travail. Benjamin replonge ainsi dans cette période sombre de l’Argentine où l’ambiance était étouffante et les apparences trompeuses…

Avec : Ricardo Darín, Soledad Villamil, Pablo Rago

Un thriller impeccablement ficelé

Il est des films dont on ne ressort pas indemne. Celui-ci en fait définitivement partie.  Adapté du roman La pregunta de sus ojos d’Eduardo Sacheri , Dans ses yeux réussit naturellement à être excellent là où on l’attend, à savoir un thriller mais il touche bien plus large : une histoire d’amour impossible dont l’ombre règne sur le film de la première minute à la dernière ; une critique déguisée mais aiguisée de la justice argentine sans oublier bien sûr une plongée dans les tréfonds des motivations psychologiques des hommes (avec un petit h).

Quand le scénario rencontre l’Histoire

1974, une jeune femme de 23 ans, Liliana, tout juste mariée, se fait violer et assassiner. Le policier Benjamin Esposito découvre son corps mutilé et décide de prendre cette affaire au sérieux en dépit des obstacles auxquels il doit faire face. Malgré des magistrats corrompus, qui souhaitent classer l’affaire au plus vite, Esposito, accompagné de Sandoval son meilleur ami, réussit à arrêter le coupable. Ce qui pourrait être la fin du film n’est finalement que le début de l’histoire. Deux ans plus tard, au moment où la junte militaire renverse la présidence de Isabel Martínez de Perón, le meurtrier est relâché pour venir garnir les milices de la dictature qui s’installe.

Quand l’amour rate son train

En parallèle, on suit l’histoire d’amour avortée entre Esposito et Irene, sa supérieure au moment de l’affaire. Belle, charismatique, fiancée à un homme riche, Irene est inaccessible aux yeux d’Esposito qui ne voit pas que son amour est réciproque. L’occasion manquée se cristallise dans une scène emblématique qui structure la temporalité du film  : la séparation sur le quai de gare, déchirante de nostalgie. 25 ans plus tard, les deux amants se retrouvent alors que Benjamin écrit un roman… sur l’affaire.

La justice ou la vengeance

C’est bien sûr le thème principal du film. Sans jamais verser dans le manichéisme ou le moralisme, le film confronte une justice institutionnelle corrompue à une justice personnelle vengeresse en nous laissant seuls juges. La position de chaque protagoniste évolue au cours du film entre ces deux extrêmes. Et chacun d’eux, à sa manière, nous demande jusqu’où nous sommes prêts à aller pour obtenir justice.

« Comment vivre avec le vide ? »

C’est peut-être la question centrale que pose le film. Celle qui parvient à tisser un fil entre l’amour et la justice.  Comment vivre sans amour ? Comment vivre sans justice ? Comment vivre sans passion ? Comment vivre en ayant perdu dans des conditions atroces la femme qu’on aimait ? 25 ans après la mort de Liliana, les questions semblent toujours sans réponse. Et pourtant…

 

C’est un chef-d’œuvre que signe ici Juan José Campanella.  Les flashback incessants nous invitent bien évidemment à nous poser la question du poids du passé et de l’intérêt de le remuer. Le film manie ces allers-retours à merveille. En deux heures seulement, les personnages principaux et secondaires sont dévoilés en profondeur avec chacun leur part de lumière et de noirceur. Le tout avec une telle complexité que notre colère première devient tristesse. Nous devenons spectateurs d’un drame, celui d’une justice incapable de la rendre.

 

 

 

1 Commentaire

roux 25 novembre 2017 at 20 h 12 min

Merci Sandra d’avoir écrit un si bon article sur ce film magnifique et bouleversant .
C’est un peu mon film de chevet ,celui que j’aime partager avec les personnes qui me sont proches .
un film que je peux revoir encore et encore sans jamais me lasser.

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